Une église en conversion : discours de clôture de Mgr Eric de Moulins Beaufort

« Toujours, la suite du Christ introduit un bouleversement, toujours elle nous emmène plus loin ou plus profondément... De lui, mieux que de tout autre, nous pouvons apprendre la loi du monde nouveau : le peu donne la totalité"

C’est par une conviction, l’absolue nécessité de la CONVERSION que débute ce discours : « Toujours, la suite du Christ introduit un bouleversement, toujours elle nous emmène plus loin ou plus profondément que nous n’aurions pensé aller. »

Il s’agit donc de servir le renouvellement de l’église, entrer toujours plus dans la synodalité et la collégialité. « Si le bouleversement de la conversion fait toujours un peu peur, il rend aussi joyeux, puisqu’il ne s’agit pas de se laisser aller vers la mort mais vers une vie plus pleine en se laissant approcher davantage par le Seigneur qui vient et en allant vers lui d’un pas plus décidé. »

Saisir également l’opportunité écologique : « Nos six intervenants ont tracé des chemins pour changer de mode de vie, de manière plus ou moins radicale, en nous assurant que le jeu en valait la chandelle, car ce changement ne nous permettrait pas seulement de survivre, il nous permettrait de vivre mieux, nous et des milliards d’autres avec nous. (…) . Ils nous ont fait sentir l’urgence des changements nécessaires aussi bien dans nos habitudes quotidiennes que dans les grandes orientations de nos sociétés.»

« Comment l’appel du Christ peut-il donner plus de vérité et de plus d’efficacité face à l’urgence de la « maison commune » qui se défait ? Trois pistes :

  • « Le déchirement intérieur : nous n’échappons pas aux injonctions contradictoires … La sobriété heureuse est un horizon qui peut facilement réjouir les disciples du Christ que nous sommes, mais la vivre réellement est exigeant.

La notion de « péché écologique », suggérée au synode romain sur l’Amazonie, pourrait aider à vivre ce déchirement avec patience. Car reconnaître son péché est déjà en être sorti.

  • La complexité de nos décisions les plus ordinaires … La responsabilité dans l’acte de consommation à laquelle appelait le pape Benoît XVI dans l’encyclique Caritas in Veritate est une belle exigence, la mettre en œuvre requiert de se dégager de la fascination pour la consommation facile de nos sociétés de surabondance. Pourrons-nous longtemps supporter que le mode de vie d’un Français pèse quatre fois plus sur la planète que celui d’un Indien et sept fois plus que celui d’un Haïtien ? Choisir ou renoncer par amour pour un prochain, même lointain géographiquement, est plus réjouissant que le faire pour réduire son empreinte carbone.
  • Enfin, une économie qui ne serait plus une économie de la quantité des produits mais de la qualité des liens peut éclairer le sens de la vie, même en ville…. moins de biens et plus de liens, avons-nous entendu. »

 

Poursuivre le travail

« Nous avons compris que les petits pas étaient nécessaires mais qu’il fallait aussi des décisions structurelles.

Pour les agriculteurs : ils sont prêts à d’immenses mutations dans leurs pratiques. Certains se lancent, d’autres résistent ; ils ont besoin de se sentir estimés, ils ont besoin de trouver des conseillers sûrs et désintéressés ; leurs intérêts sont parfois divergents ; ils ont besoin de se parler, de se comprendre et de trouver l’énergie de s’entraider. Notre rassemblement Terre d’espérance voudrait être une contribution à ce renouvellement de la vie du monde rural qui devrait servir bien au-delà.

Il semble qu’une phase de l’histoire du monde touche à sa fin. Comment le monde relèvera-t-il le défi ? D’où viendront les forces pour relancer un monde où tous pourraient vivre de manière juste ? Nous avons des trésors de contemplation, de silence à partager, une manière d’ascèse joyeuse qui reconnaît en tout bien, même minime, un don de haute densité. Nous pouvons offrir des expériences de fraternité qui apportent plus de joie que toutes les richesses…

La nécessité d’une élaboration théologique solide :

En explorant le monde sous la contrainte ou l’opportunité écologique, nous ne doutons pas d’apprendre à connaître le Christ notre Seigneur davantage. Précisément, il a pris une humanité complète, il a vécu l’expérience corporelle complète de se tenir dans notre cosmos. Dans son Eucharistie, dans le très peu de matière prélevée pour ce sacrifice, il se donne tout entier. Mieux encore, « il contient en lui tous les délices ». De lui, mieux que de tout autre, nous pouvons apprendre la loi du monde nouveau : le peu donne la totalité. Il nous faut donc approfondir la lumière écologique que contient l’Eucharistie.

Article publié par Réseau Laudato Si' • Publié le Vendredi 10 avril 2020 • 728 visites

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